Réflexion sur la charge mentale
Sur le blogue Je suis une maman, on parle de plusieurs sujets, on propose des recettes, des idées bricolages, des trucs et astuces pour aider les familles avec leur quotidien et bien plus encore.
On aime aussi partager nos pensées, à travers une lettre ou un témoignage, car on trouve ça important d’avoir un endroit où nous pouvons échanger, s’écouter et s’entraider.
Mélanie, une collaboratrice du blogue, souhaitait partager une réflexion sur la charge mentale.
En la lisant, j’ai été touchée par son témoignage, ses mots.
Voici son témoignage sur la charge mentale.
J’ai envie de rebondir sur le terrible et triste incident qui s’est produit plus tôt la semaine dernière (la maman qui s’est jetée en voiture dans la rivière avec ses deux filles). Je sais que notre cerveau raisonnable tente à nous faire dire des phrases comme : « elle aurait pu… », « elle n’aurait pas dû… », «moi je…».
Je comprends que ça reste un suicide et un meurtre.
Je ne cherche pas à atténuer les événements et je ne connais pas le contexte de ce drame.
Mais aujourd’hui, j’ai envie de vous dire en toute transparence que ça aurait pu être moi.
Je viens d’avoir mon 4e enfant.
C’est mon post-partum le plus simple, le plus doux, le plus humain. Je n’ai pas perdu mon identité, je ne me sens pas en survie.
Pourquoi? Il y a un pourquoi et il n’a rien à voir avec mes capacités, mon âge, mon expérience, ma stabilité ou ma force mentale.
Depuis 2 ans, mon chum est père au foyer. Je me souviens qu’au départ, il me disait qu’il ne comprenait pas pourquoi je trouvais ça exigeant les rushs du matin et du soir.
Je lui avouais que parfois, j’arrivais au travail à 8h et que j’avais l’impression que je devais me coucher pour la nuit tant il s’en était passé des choses et que je me sentais épuisée.
Au départ, il ne pensait pas à tout. Il ne mettait qu’un sandwich dans les lunchs, ne prévoyait pas les vêtements en fonction de la météo, oubliait des tas d’autres trucs dont les rendez-vous changer les souliers quand ils ne faisaient plus, s’assurer que tout le monde avait des bobettes propres pour le lendemain…
Ç’a été dur de me taire et de le laisser se tromper, surtout en sachant que ça affectait directement les enfants, mais il fallait qu’il prenne la charge.
Quand les enfants revenaient en ayant eu faim ou froid, il apprenait.
Il a appris.
7 mois plus tard, il est venu me voir pour s’excuser. Il m’a dit avoir enfin compris son rôle et il était désolé de m’avoir laissé tout cela sur les épaules aussi longtemps.
Pourtant, avant, mon chum faisait les repas, la vaisselle, etc. On pouvait dire qu’il s’impliquait.
Quand mon 4e est né et qu’il était présent pour m’aider, pour vrai, j’ai réalisé à quel point je l’avais eu dur aux autres bébés. J’ai réalisé à quel point on l’avait toutes dur!
Là, je n’avais pas juste un chum qui aidait quand je le demandais, j’avais un chum qui gérait tout. Je n’avais qu’à me reposer, allaiter et quand j’étais fatiguée, il prenait bébé.
Je me suis rappelé le sentiment de détresse que j’avais durant les nuits où bébé pleurait sans cesse en sachant que je devais être debout à 6 h pour les autres et faire toutes les tâches qu’on ne peut reporter au lendemain.
Je me suis rappelé le sentiment d’angoisse, de souffle court, de solitude.
Je me suis souvenue qu’enceinte de ma 2e il y a 8 ans, et je l’avoue depuis très peu ouvertement, j’ai eu des idées suicidaires.
J’avais l’envie très forte de rentrer dans un mur sur l’autoroute. Je pensais à me faire avorter et quitter mon chum et ma première fille, que j’aimais pourtant plus que tout!
Je ne me reconnaissais plus.
Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Mon médecin a dû me provoquer parce que j’allais passer à l’action. Merci à Dr Virginie Deslauriers d’avoir compris l’importance de ma détresse.
J’ai fini d’avoir honte de ces périodes de ma vie. J’ai fini de me sentir coupable.
Parce que maintenant que j’ai eu de l’aide, pour vrai, je réalise à quel point j’étais seule et que notre culture gagnerait à changer.
On n’a qu’à regarder comment ça se passe ailleurs pour comprendre à quel point les mamans d’ici sont laissées à elles-mêmes.
Ce n’est pas pour rien que la 2e cause de mortalité entourant la naissance, c’est le suicide.
Et là, je vois mon chum trouver ça dur, perdre son identité, se sentir rushé, pris dans une boucle sans fin…
Et pourtant, je suis là pour aider!
Et oui, les rôles sont inversés.
J’aide du mieux que je peux, sachant à quel point c’est réellement exigeant.
Voici la liste des choses que j’ai apprises dans cette expérience et qui ont réellement fait la différence:
Notre entourage apportait des repas faits maison tous les jours pendant 15 jours suite à la naissance de mon bébé et ce, sans qu’on ne demande rien.
Quand bébé pleurait la nuit, mon chum venait le prendre pour le promener et l’endormir et je n’avais pas cette appréhension que je manquerais de force pour le lendemain.
Quand quelqu’un venait à la maison et voyait notre pile de linge à plie, il la pliait.
J’ai gardé mon identité d’entrepreneure.
J’ai eu l’espace pour m’épanouir personnellement.
Quelqu’un prenait la charge des matins et des soirées sans me poser de questions et sans oublier quoi que ce soit.
Si je sentais le besoin de continuer à dormir, je pouvais le faire et le reste se faisait quand même.
Si je ressentais le besoin de faire une sieste, je pouvais le faire et le reste se faisait quand même.
Quelqu’un préparait tout le nécessaire pour partir sans que je craigne que quelque chose ne soit oublié.
Peut-être as-tu vécu ta maternité autrement? Tant mieux!
Mais j’ai la conviction que je ne suis pas la seule, je me trompe?
Je comprends aussi que ce n’est pas toujours facile et réalisable dans la société dans laquelle nous vivons. Certaines personnes doivent quitter la maison pour travailler ou même travaillent loin de la maison et doivent partir quelques jours.
Nous avons tous des réalités différentes. Cela dit, je pense que nous devons aborder le sujet de la charge mentale et trouver des façons d’aider les femmes, peu importe leur quotidien.
As-tu d’autres suggestions à faire pour soutenir une maman, peu importe sa réalité ?
Si tu as besoin d’aide, de soutien ou tu as simplement besoin de parler à quelqu’un, voici une ressource à notre disposition.
Parlons Suicide Canada : 1.833.456.4566
Toute l’équipe du blogue tient à offrir ses sincères condoléances à toutes les personnes touchées de près ou de loin par cette tragédie familiale. Vous êtes tous dans nos pensées.
Article rédigé par Mélanie Claveau Blogueuse – Team J
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